ISSN

ISSN 2496-9346

mardi 12 juillet 2016

karoly, Le Lyon de l'avenir (1911)

Dans la presse locale l'on découvre régulièrement des anticipations imaginant l'avenir de telle ou telle ville. Si Les Paris du futur (et même Les Ruines futures de Paris !) sont bien connus, il n'en est pas de même des futurs de province. 
Voici un petit texte sur le Lyon de l'avenir (découvert dans le fonds de la Bibliothèque numérique de Lyon) avec les nouveaux principes urbanistiques et hygiénistes, ses transformations dans le domaine des transports et sa métamorphose à 80 ans d'écart. L'article fut publié le 1er avril 1911 - et daté fictivement du 1er avril 1991 -  dans La Construction lyonnaise (un bi-mensuel consacré à l'architecture, au génie civil et aux travaux publics).


Comme une ville se transforme en l'espace de mille ans !
Ceux de nos ancêtres qui ont connu les terreurs de l'an 1000, s'ils revenaient au monde, auraient grand'peine à reconnaître aujourd’hui leur bonne ville de Lyon.
Suivant la prédiction faite vers 1820 (par Vitton, sauf erreur), la Guillotière a absorbé Lyon ; je veux dire que le centre des affaires qui avait franchi la Saône au moyen âge, vient de franchir le Rhône au cours du présent siècle.
Le Lyon de la rive droite de la Saône n'est plus seulement la cité mystique, mais est devenu en outre un centre pittoresque de promenades d'agrément. Après cent vingt ans de travaux alimentés par la piété des fidèles et leurs généreuses aumônes, la monumentale église de Fourvières est enfin achevée ! Tout autour, le coteau forme un immense parc ouvert au public, coupé à mi-hauteur par une avenue plantée d'arbres demi-séculaires, qui rejoint vers le sud l'avenue Valioud, et se relie vers le nord avec le cours des Chartreux par le moyen d'un pont dominant la Saône de 50 à 60 mètres ; ce pont est à deux étages, l'un pour les voitures, tramways et automobiles, l'autre pour les piétons et cyclistes. Le plateau lui-même est resté le domaine des établissements religieux, mais de larges avenues sillonnent ce plateau, rendant facile dans tous les sens l'accès de notre basilique, que le monde nous envie.
L'enceinte de fortifications, qui étouffait autrefois l'essor des voies de communication, a fait place à des promenades ombreuses avec des points de vue aussi étendus que variés. De somptueuses installations, dans le genre des casernes anglaises, remplacent plus qu'avantageusement les affreuses casemates que comportaient, naguère, les anciens forts de Loyasse et de Vaise.
Une grande opération de voirie et d'hygiène a transformé les quartiers Saint-Georges, Saint-Jean et Vaise ; de magnifiques villas remplacent maintenant les taudis qui s'étageaient autrefois sur la montée fameuse du Gourguillon, rue Bourdy et montées des Epies ou des Chazeaux. A Vaise, les anciens emplacements des abattoirs ou du marché aux bestiaux sont couvertes de constructions hygiéniques à bon marché avec jardins de famille.
La presqu'île de Perrache a reçu, elle aussi, quelques heureuses transformations : grâce à la construction d'un pont de chemin de fer sur le Rhône vers Pierre-Bénite, grâce aussi au développement inouï des transports fluviaux en général et du port Rambaud en particulier, la gare Perrache, devenue presque sans utilité, a été rasée et se trouve actuellement remplacée par une cité ouvrière parfaitement aménagée.
Une autre cité ouvrière s'étage sur les pentes de la Croix-Rousse, entre la Grand'Côte et la montée Saint-Sébastien, aux lieu et place des maisons de 5 ou 6 étages qui servaient de domicile et d'atelier aux canuts du temps de la Révolution.
Le pont monumental qui relie les deux collines n'est pas, d'ailleurs, le seul moyen de communication entre les populations des deux plateaux lyonnais. Une flottille d'aéroplanes de toutes formes et de toutes dimensions fait un service régulier de transbordement entre la Croix-Rousse et Fourvières-Loyasse ; aussi les recettes des funiculaires de la rue Terme et de Saint-Paul commencent à baisser de façon inquiétante.
Mais c'est surtout sur la rive gauche du Rhône que s'est développée la population, qui n'est pas loin d'atteindre 1 million d'âmes, depuis la réalisation des projets d'annexion sur lesquels ont pâli tant de générations.
L'exode vers l'est du Lyon monumental, qui avait commencé par la Préfecture, le Mont de Piété, les Facultés, s'est continué ensuite par les abattoirs, le grand Lycée de garçons, la Manufacture des tabacs, le grand Hôtel-Dieu, la Condition des Soies, la Banque de France et divers établissements de crédit. Cet exode a été suivi par le Palais du Commerce, l'hospice de la Charité, l'hôtel du Gouverneur ; il est question maintenant de rien moins que de construire à neuf, à la place des casernes de la Part-Dieu, décidément démodées, une salle de fêtes genre Colisée, avec jardins et fontaines, un hôtel de ville et un Palais de justice ; l'ancienne mairie centrale deviendrait la Bourse du travail, et le Palais de Justice serait transformé en caserne. Le cours Garibaldi est devenu l'artère principale de la ville et rivalise avec les boulevards de Paris.
De petites villes ouvrières ont surgi dans les quartiers du Tonkin, des Poulettes, à Bon Coin, à Montchat, au Bachut. Des avenues de 30 à 40 mètres de largeur, desservies par des tramways et des autobus, relient ces cités ouvrières aux différentes usines et fabriquent, qui couvrent le terrain jusqu'au mur d'enceinte.
La plupart des constructions nouvelles ont leur toiture en terrasse, ce qui facilite singulièrement l'emploi d'aéroplanes pour les déplacements. Aussi les automobiles commencent à passer de mode.
Enfin, le projet Moncorgé revient à l'ordre du jour…

1er avril 1991

Karoly

En contrôlant les épreuves au moment du tirage, nous nous apercevons que notre collaborateur, au lieu de son article habituel, a subrepticement fait passer l'oeuvre d'un de ses parents qui est doué de double vue. Les nécessités du tirage ne nous permettent plus de le remplacer (N.D.L.R.)


Karoly, « Le Lyon de l'avenir », in La Construction lyonnaise
33e année, n°7, 1er avril 1911

Source du texte: Bibliothèque numérique de Lyon  
A lire sur ArchéoSF les textes:
Général Baron Thomas, Grenoble en l'an 2000 (1893)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire